Le Puy du Fou, un puits de Faux
Voir ci-dessous l’article de Télérama à propos du livre de quatre historiens sur le Puy du Fou. Suivi d’un article du Sans-Culotte 85 sur le même sujet.
Télérama 3770 – 13.04.2022
Décryptage
LE PUY DU FOU, UN PUITS DE FAUX
Dans un livre paru fin mars, Le Puy du Faux, quatre historiens expliquent comment le célèbre parc d’attractions vendéen malmène l’histoire au profit d’un discours réactionnaire, emblématique de la bataille culturelle menée par la droite extrême. Laquelle a réagi avec une violence révélatrice.
Pourquoi et comment a été écrit Le Puy du Faux ?
« L’histoire n’attend que vous », clame le slogan du Puy du Fou. Oui, mais quelle histoire ? Son traitement de la Révolution française et du prétendu « génocide vendéen » avait déjà été critiqué. Cette fois, les presque deux millénaires évoqués dans le parc sont étudiés par une antiquisante (Pauline Ducret), un médiéviste (Florian Besson), un moderniste (Guillaume Lancereau) et une contemporanéiste (Mathilde Larrère). Ils ont vu les représentations mais aussi fréquenté les restaurants, scruté livres et objets vendus dans les boutiques, lu les « livrets pédagogiques » et l’autobiographie de Philippe de Villiers, créateur du parc, auteur de tous les spectacles. L’enjeu est de taille : le Puy du Fou accueille plus de deux millions de visiteurs par an et prétend s’adresser aux scolaires.
Quels enseignements en tirer ?
« Des étoiles plein les yeux et le cerveau qui bugue », résument les auteurs. Eblouis par des spectacles grandioses, ils relèvent toutefois quantité d’erreurs, d’anachronismes, de contrevérités. Et l’omniprésence d’une idéologie réactionnaire. A travers un passé fantasmé est présentée, note Florian Besson, « une France éternelle jamais plus belle que dans le catholicisme et la royauté ». Pour Mathilde Larrère, le Puy du Fou délivre « un discours anti-universaliste, antirépublicain, anti-égalitaire, xénophobe ».
Pourquoi tant de haine contre les auteurs du livre ?
« Propagande woke », « gauchistes, « fils de p… marxistes », « extrémistes » … Depuis la parution du livre, les quatre historiens subissent sur les réseaux insultes voire menaces de mort (on promet le « bûcher » aux autrices, le « pal » au auteurs). Sur RMC, Les Grandes Gueules les situent dans « la mouvance de la cancel culture ». Sur CNews, Mathieu Bock-Côté dénonce « des commissaires politiques » abusant des « poncifs du politiquement correct ». Ces procès d’intention ne reposent sur aucune remise en cause de la solidité des arguments développés par les chercheurs. La (fausse) polémique montre ainsi combien il est dérangeant – et vital – de réfuter le roman national promu par l’extrême droite. – Samuel Gontier
Le Puy du Faux. Enquête sur un parc qui déforme l’histoire,
Ed. Les Arènes, 210 p., 18 €.
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Le Sans-Culotte 85 – N° 147 – AVRIL 2022
Lu pour vous
Au Puy du Fou, ce fameux « bon vieux temps » ou l’histoire « maltraitée »
Nous étions très curieux de lire cet ouvrage sorti fin mars, au titre on ne peut plus explicite : « Le Puy du Faux » (1) … Rédigé par quatre historiennes et historiens, il entend démonter minutieusement la « déformation » et la « réécriture » de l’histoire par le parc vendéen. Des auteurs qui prennent soin d’expliquer qu’ils n’ont pas adopté la posture de surplomb d’universitaires donneurs de leçon, qui dénonceraient par principe ce lieu emblématique de la culture populaire : « Nous n’avons pas cherché ici à stigmatiser le public, qui a de nombreuses et légitimes raisons d’apprécier le parc. » Tout en ayant trouvé les spectacles « magnifiques », ils ont entrepris de traquer les erreurs factuelles, simplifications, clichés et autres anachronismes qui, selon eux, jalonnent le parcours du Puy du Fou. Prenant au sérieux le succès du parc vendéen, qui attire chaque année 2 millions de personnes, les auteurs ont passé plusieurs jours sur place, observant tous les spectacles mais scrutant aussi les hôtels, restaurants, boutiques … Ils en tirent une conclusion générale : le site entretient une vision passéiste de l’histoire, « figée dans le temps », qui consacre une « France éternelle », catholique, royaliste, se tournant sans arrêt sur ce « bon vieux temps fantasmé ». Sans parler de l’importance de la Vendée, « placée au cœur de l’histoire » mais « sans cesse menacée par l’extérieur » …
Le Puy du Fou brosse plusieurs siècles de l’histoire. Autant de périodes qui, selon les auteurs, sont « malmenées » par le discours puyfolais. Parmi les déformations historiques relevées dans le livre, citons : le baptême de Clovis présenté, à tort, comme la « naissance du royaume de France » ; l’invention des arènes « oblongues », qui correspondent comme par hasard à la forme du stadium du parc … mais qui n’ont jamais existé, etc. Autre arrangement avec l’Histoire : pas de diversité religieuse, pas de trace du protestantisme. Alors même qu’aux XVI et XVIIème siècles, « la Vendée en général, et la région du Puy du Fou en particulier, fut aussi une terre protestante », rappellent les auteurs. Soulignons également un sujet sensible par ici, au cœur du dispositif du Puy du Fou : les guerres de Vendée. S’ils ne nient évidemment pas l’ampleur et la violence des évènements, les historiens rappellent que la thèse du « génocide vendéen » y est affirmée « contre toute l’historiographie savante ».
L’objectif de ce livre : donner des clés de lecture avant de voir les spectacles. « On ne dit pas du tout qu’il ne faut pas aller au Puy du Fou. On a simplement voulu permettre au public d’être armé face au discours qui est produit », résume Guillaume Lancereau, spécialiste de la Révolution française et co-auteur de l’ouvrage.
Un ouvrage déjà cloué au pilori
Au vu des réactions virulentes qui ont inondé les réseaux sociaux suite à la publication de ce livre, on ne peut que se dire qu’il tape là où ça fait mal ! Passons sur les attaques ad hominem ou, pire, la menace de mort reçue par l’un des auteurs … Petit florilège des critiques ou reproches adressés par des internautes (qui ont lu le livre… ?) : ces historiens « woke » ou « gauchistes » qui découvrent que l’Histoire est mise en scène… ; « Et pourquoi ne pas écrire un livre sur le Parc Astérix ou l’impérialisme américain à Disneyland ? », etc. Un point sur lequel Guillaume Lancereau répond du tac-au-tac : « La grande différence avec le parc Astérix ou Disneyland, c’est qu’on n’y trouve pas, dans les boutiques, des livrets pédagogiques pour les enfants. Or c’est le cas au Puy du Fou. » On peu aussi relever les sorties scolaires à visée éducative qui y sont toujours organisées par des établissements publics pour des élèves de primaire… Sans oublier l’ambition assumée depuis longtemps par Philippe de Villiers, de mener, à travers le parc, « un combat mémoriel et culturel », insiste le livre. Un site touristique, pointe l’ouvrage, qui est mis au service d’une idéologie « réactionnaire », adepte du fameux « roman national » cher au Vicomte et à son ami Eric Zemmour…
- « Le Puy du Faux. Enquête sur un parc qui déforme l’Histoire », par Florian Besson, Pauline Ducret, Guillaume Lancereau et Mathilde Larrère. Publié aux éditions Les Arènes.
Vendéen depuis au moins 1680 dernière date trouvée dans les archives.
Bonjour, je n’étais pas franchement chaud pour l’acheter et lire. Comme souvent c’est lors d’une rencontre sur l’heure de midi que le sujet se glissa dans la conversation. Lui, ancien directeur d’un grand lycée du privé, je voulais comprendre. Bien m’en a pris d’ ouvrir le livre en début d’après midi car je ne l’ai refermé qu’ au bout de la 186ème page qui clôture le livre. Je pense qu’il serait préférable de le lire pour mieux en parler afin d’alimenter une conversation constructive.
Bonjour
J’adore aller au puy du fou, mais là j’avoue que cet article me donne envie de lire le livre.
Mais vais je pour autant renier que ce parc d’attraction est incroyable et même superbe (allons y avec les superlatifs et compliments)
Quoi qu’il ne soit nous pouvons profiter de ce parc sans pour autant nous associer avec tous les maux que l’on voudrait bien lui reprocher.
Samir (et même pas français) 🙂
GESTIVERT
Location de plantes
https://gesti-vert.com/
Y aller en étant conscient de la manip idéologique ?… Quelqu’un disait qu’ « on vote avec ses pieds », autrement qu’on fait un choix de société en allant consommer.